Droits de l’employeur lorsqu’un travailleur l'informe qu'il est malade : quelques FAQ

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I. LE TRAVAILLEUR DOIT INFORMER L’EMPLOYEUR DE SON INCAPACITE DE TRAVAIL 

1.1. Quand le travailleur doit-il informer l’employeur?

Le travailleur est tenu d’informer sans délai son employeur de son incapacité de travail. Sans délai signifie qu’il doit le faire aussitôt qu’il en a la possibilité. L’on peut considérer que ce moment correspond au premier jour de l’incapacité. En cas de désaccord, il appartient au travailleur de prouver qu’il a averti son employeur.

1.2. Comment le travailleur doit-il informer son employeur?

La loi ne prévoit rien en ce qui concerne la forme de la communication mais il faut que l’employeur soit informé clairement du fait que le travailleur sera absent du travail pour cause de maladie. La notification peut être effectuée par différentes voies: téléphone, fax, lettre, verbalement par l'entremise d'un membre de la famille ou d'un collègue…...La preuve la plus absolue reste l'envoi d'une lettre recommandée ou la remise du certificat médical avec signature d'un accusé de réception. La charge de la preuve revient au travailleur.

1.3. Quid du travailleur qui n'avertit pas?

La loi relative aux contrats de travail ne précise pas la sanction à appliquer au travailleur qui ne respecte pas cette obligation. Lorsque le règlement de travail stipule que le travailleur doit avertir son employeur le jour même du début de l'incapacité par toutes les voies de communication dont il dispose et que le travailleur manque à cette obligation, il perd le droit au salaire garanti pour tous les jours précédant la notification.

II. LE TRAVAILLEUR DOIT PRODUIRE UN CERTIFICAT MEDICAL 

2.1. Le travailleur est-il obligé de produire un certificat médical?

Le travailleur est obligé de produire un certificat médical si le règlement de travail le lui impose, si cela est prévu par une CCT ou à défaut d’une semblable disposition, à la demande de l’employeur. Lorsque le règlement de travail ou la CCT ne prévoit rien en la matière, l’employeur devra exiger expressément lors de chaque absence la présentation d’un certificat médical.

2.2. Quand le travailleur doit-il rentrer ce certificat médical?

Le travailleur doit rentrer le certificat médical à l’entreprise ou l’envoyer à son employeur dans les deux jours ouvrables à compter du jour de l’incapacité ou de la réception de la demande de l’employeur. Il est possible de prolonger ce délai par la conclusion d’une CCT ou par le règlement du travail. Toutefois, ce délai ne pourra jamais être plus court que deux jours ouvrables. Si le certificat est envoyé par la poste, c’est le cachet de la poste qui fait foi. Tout ceci vaut sous réserve de force majeure empêchant le travailleur malade de respecter le délai imposé. 

2.3. Quelles sont les mentions à reprendre sur le certificat médical?

La loi indique expressément les mentions à reprendre sur le certificat médical:

  • la raison de l’incapacité de travail;
  • la durée probable de l’incapacité de travail ;
  • si le travailleur est ou non autorisé à sortir.

En plus le certificat devra comporter les éléments suivants:

  • les coordonnées du médecin qui a établi le certificat;
  • la date d’établissement du certificat.

Attention! les documents qui ne satisfont pas aux conditions qui précèdent ne sont pas considérés comme des certificats médicaux.

2.4. Existe-t-il des sanctions?

  • Remise tardive: l'employeur peut refuser - sauf en cas de force majeure - le paiement du salaire garanti pour les jours antérieurs à la remise ou à l'envoi du certificat ;
  • Non production: la loi ne prévoit pas de sanction. La doctrine défend la thèse de l’application de la même sanction que celle prévue pour la remise tardive ;
  • Production d'un certificat non conforme: la loi ne prévoit pas de sanction. Selon les travaux parlementaires, l’absence des mentions obligatoires ne signifie pas que le travailleur n’a pas communiqué son incapacité de travail, ni que cela lui fait perdre le droit au salaire garanti. En pratique, l’employeur exigera du travailleur de demander à son médecin de corriger le certificat incomplet.

2.5. L’employeur a-t-il le droit de licencier pour faute grave le travailleur qui omet de produire un certificat médical?

Une période d'absence non couverte par un certificat médical sera considérée comme une période d'absence non justifiée. Toutefois, dans la plupart des cas, cette absence ne pourra pas entraîner le licenciement pour faute grave et ce même si ce fait figure parmi les fautes graves reprises dans le règlement de travail.

2.6. Quid du travailleur dont l’incapacité de travail est prolongée?

La loi relative aux contrats de travail ne prévoit pas de délai de notification lorsque l’absence du travailleur se poursuit au-delà de la date de fin prévue.

Trois courants se distinguent dans la jurisprudence:

  • Le premier courant est d’avis qu’un nouveau certificat est exigé lorsque l’incapacité de travail se poursuit au-delà du délai prévu initialement ;
  • Le deuxième courant est d'avis contraire sauf si l’employeur ne pouvait pas ignorer l’état de santé du travailleur ;
  • Le troisième courant considère que l’absence prolongée du travailleur donne lieu à une présomption d’incapacité quand l’employeur omet de se renseigner au sujet de l’état de santé du travailleur.

L’employeur a intérêt à  prévoir dans son règlement de travail qu’en cas de prolongation éventuelle de l’incapacité de travail, un certificat de prolongation, avec la durée probable de celle-ci, doit être remis dans un certain délai. Les règlements de travail édités par Group S prévoient une telle clause. Si la nouvelle incapacité de travail est due à un tout nouveau fait, il incombe au travailleur de la justifier à l’aide d’un nouveau certificat médical qui devra être remis dans un délai raisonnable.

III. CONTROLE DE L’INCAPACITE DE TRAVAIL 

La production d'un certificat médical n'ouvre pas d'office le droit pour le travailleur au salaire garanti. En effet, l'employeur est en droit de faire contrôler la réalité de l'incapacité. Tant que l'employeur n'exerce pas son droit de contrôle, il ne peut mettre en cause l'existence de l'incapacité de travail.

3.1. Qui peut effectuer le contrôle?

L'incapacité de travail doit être contrôlée par un médecin, généraliste ou spécialiste, à l'exclusion d'infirmiers/infirmières et de tout autre personnel paramédical. N'entrent également pas en ligne de compte les autres praticiens, notamment les dentistes. Le médecin-contrôleur doit remplir certaines conditions cumulatives:

  • être en droit de pratiquer l'art de guérir;
  • pouvoir justifier de 5 ans d’expérience en tant que médecin généraliste ou d'une pratique médicale équivalente;
  • être totalement indépendant par rapport à l’employeur et au travailleur contrôlé.

Lorsque les conditions précitées sont remplies, l'employeur peut librement choisir le médecin qu'il chargera du contrôle. Il peut notamment faire appel aux services d'un organisme spécialisé. A tout moment l'employeur peut modifier unilatéralement le choix qu'il a fait même si le contrat de travail ou le règlement de travail avait désigné un médecin-contrôleur particulier.

Attention ! Ce contrôle ne peut jamais être effectué par un conseiller en prévention-médecin du travail, celui-ci ayant une mission purement préventive.

3.2. Le travailleur peut-il refuser le contrôle?

Le travailleur doit prendre les mesures nécessaires afin de permettre le contrôle. Le travailleur ne peut pas refuser de se faire examiner par le médecin contrôleur. Si le travailleur réside à l'étranger, l'employeur est en droit de faire contrôler le travailleur dans le pays où celui-ci se trouve. Dans ce cas, le travailleur devra informer l'employeur du lieu de son séjour. Si le travailleur manque à cette obligation d’information, il rend impossible le contrôle.

3.3. Où se fait le contrôle?

  • si la sortie du travailleur est autorisée, le médecin contrôleur peut soit inviter le travailleur à se présenter à un lieu, date et heure déterminés par lui, soit examiner le travailleur à son domicile à une date et heure annoncées ou non.
  • si la sortie du travailleur est interdite, il appartient au médecin contrôleur d’effectuer le déplacement. Dans ce cas il faut que le travailleur soit accessible, soit dans son lieu de résidence soit dans un autre lieu où il est soigné ou prend du repos.

L’employeur prend en charge les frais de déplacement supportés par le travailleur.

3.4. Comment le contrôle se déroule-t-il?

Le médecin contrôleur consigne ses constatations sur un certificat médical écrit et en informe aussitôt le travailleur et l’employeur. Si le travailleur conteste les constatations, le médecin en fera état dans son certificat.

Le médecin doit préciser dans son certificat si le travailleur est effectivement inapte au travail. Sur base de la durée probable de l’incapacité, le médecin peut se prononcer sur une prolongation éventuelle de l’incapacité mais il ne peut pas établir lui-même un certificat médical. L’incapacité de travail peut être contrôlée pendant toute la durée de celle-ci.

3.5. Quid du travailleur qui se soustrait au contrôle?

La loi ne prévoit aucune sanction pour le travailleur qui se soustrait au contrôle. Il s’agit d’une question de faitet il incombe à l’employeur de le prouver. Certains se réfèrent à la jurisprudence existante qui dispose que le droit au salaire garanti est perdu à partir du premier jour de l'incapacité de travail. D’autres prétendent que le salaire garanti peut seulement être refusé à partir de la date du premier examen médical auquel le travailleur ne s’est pas rendu ou à partir de la date de la première visite à domicile lors de laquelle le médecin contrôleur n’a pas rencontré le travailleur.

3.6. Le travailleur qui se soustrait au contrôle, peut-il être licencié pour faute grave?

Le fait pour le travailleur de se soustraire au contrôle ne suffit pas pour le licencier pour faute grave.

Il se peut toutefois que le travailleur se soit soustrait aux contrôles à plusieurs reprises.

  • Si l’employeur a convoqué le travailleur plusieurs fois pour se présenter à un contrôle,  que le travailleur a chaque fois refusé d’y réserver la suite voulue, et que cette situation s’est présentée également à l’occasion d’incapacités de travail antérieures, ce refus peut justifier le licenciement pour faute grave ;
  • Si le travailleur a expressément empêché un contrôle, l’employeur a également le droit de licencier le travailleur pour faute grave.

Dans tous les cas énoncés ci-dessus, il est nécessaire de pouvoir démontrer que le travailleur s’est soustrait au contrôle.

3.7. Que se passe-t-il quand le médecin traitant et le médecin contrôleur formulent des conclusions contraires?

Etant donné que les deux certificats ont la même valeur, l’employeur peut refuser le salaire garanti à partir de la date du premier examen médical de contrôle auquel le travailleur a été convoqué ou de la date de la première visite à domicile du médecin-contrôleur, puisque son incapacité de travail n’est pas établie de manière certaine. Le travailleur, de son côté, a le droit de rester chez lui puisqu’il n’est pas considéré comme étant en absence injustifiée. En pratique, le travailleur ayant pris connaissance des résultats de l'examen de contrôle peut se faire délivrer par son médecin traitant un nouveau certificat attestant de nouveau son incapacité de travail. Cette nouvelle conclusion n'apporte pas la preuve requise de l'incapacité de travail.

Dans une situation d’impasse, les parties peuvent se mettre d’accord sur la désignation d’un médecin-arbitre dans les deux jours ouvrables de la présentation des conclusions du médecin-contrôleur ou s’adresser au tribunal pour une procédure judiciaire d’expertise médicale.

3.8 Qu’en résulte-t-il pour l’employeur?

Si le médecin-contrôleur établit que le travailleur est capable de travailler, l’octroi du salaire garanti lui sera refusé à compter du jour où le contrôle a eu lieu. Si par contre, le médecin-contrôleur reconnaît que, la période sur laquelle porte la contestation était bien une période pendant la quelle le travailleur était incapable de travailler, l’employeur devra régulariser la situation et payer le salaire garanti afférent à cette période.

La décision qui découle de la procédure arbitrale est définitive et lie les deux parties. Il n’est plus possible de soumettre le litige si une décision arbitrale est intervenue.