Nouvelles mesures en matière de lutte contre les abus en cas d’occupation internationale

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Le principe de l’Etat de prestations

La législation de sécurité sociale applicable à un ressortissant  d’un Etat-membre de l’EEE occupé sur le territoire d’un autre Etat-membre de l’EEE est déterminée par le principe de l’Etat de prestations : la sécurité sociale applicable est celle de l’Etat sur le territoire duquel les activités professionnelles sont effectuées. Cette règle  découle des Règlements en vigueur au sein de l’EEE qui déterminent la législation de sécurité sociale applicable en cas d’occupation transfrontalière.

Occupation internationale et détachement

Une dérogation importante au principe de l’Etat de prestations est le détachement: sous certaines conditions, des personnes occupées dans un autre pays peuvent rester assujetties à la sécurité sociale de leur Etat d’envoi (celui depuis lequel le détachement a lieu). Des exceptions sont également prévues pour les travailleurs occupés simultanément dans plusieurs Etats-membres: en principe, ceux-ci  ne sont assujettis à la sécurité sociale de leur Etat de résidence qu’à condition qu’ils y exercent une partie substantielle de leurs activités.

Détachement frauduleux

Le droit social européen faisant très fréquemment l’objet de contournements et de détournements, la loi-programme du 27 décembre 2012 (M.B. 31 décembre 2012) introduit de nouvelles mesures dans la lutte contre les abus qui se produisent dans le travail transfrontalier et en particulier dans le cadre  de la mobilité internationale des travailleurs.

Dorénavant, il est question d’abus au niveau des règles visant à déterminer la législation applicable lorsque, à l’égard d’un travailleur salarié ou d’un travailleur indépendant, ces règles ne sont pas respectées dans le but de se soustraire à la sécurité sociale belge qui aurait dû être appliquée à une situation déterminée.

Il est par exemple concevable qu’une société belge crée à l’étranger une société « boîte aux lettres », laquelle engage à l’étranger des travailleurs résidant en Belgique pour les détacher aussitôt en Belgique. Ainsi la société fictive pourrait appliquer la sécurité sociale de l’Etat d’envoi, ce qui est contraire aux règles de détermination du Règlement dans la mesure où la société détachant les travailleurs doit avoir des activités économiques significatives dans l’Etat d’envoi et que les travailleurs, préalablement au détachement, doivent avoir été soumis au moins un mois à la sécurité sociale de l’Etat d’envoi. De telles pratiques constituent indiscutablement des détournements de la loi.

De même, ces mesures visent par exemple à brider l’occupation simultanée dans plusieurs Etats membres. Par occupation simultanée, il faut entendre ici des travailleurs qui, seulement sur papier, travaillent dans plusieurs Etats (par exemple par l’insertion dans le contrat de travail d’une clause qui prévoit des lieux de travail dans différents pays) alors qu’en réalité, ils n’exercent leurs activités professionnelles que dans un seul pays. De tels montages sont souvent utilisés pour échapper à l’obligation de cotisation en Belgique étant donné que dans  la plupart des régimes étrangers, les cotisations sociales sont moins élevées.

Lorsque le juge national, une institution publique de sécurité sociale ou un inspecteur social constate un tel abus, le travailleur salarié ou indépendant concerné sera assujetti à la législation belge de sécurité sociale si cette législation aurait dû être appliquée conformément aux règles de détermination européennes, à partir du premier jour où les conditions de son application sont remplies, en tenant compte cependant des délais de prescription valables
en droit de la sécurité sociale.

Il appartient à l'institution ou à l'inspecteur qui invoque l'abus d'en apporter la preuve.