Délai de prescription en affaires de travail : possibilité de l'interrompre et donc de le prolonger !


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L’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 stipule que les actions qui naissent du contrat de travail (par exemple : la contestation d’un licenciement pour motif grave, la réclamation d’une indemnité de préavis, la réclamation d’une indemnité pour licenciement abusif, la demande d’indemnisation de l’employeur pour vol de biens lui appartenant) sont prescrites un an après la cessation de ce contrat ou cinq ans après le fait qui a donné naissance à l'action, sans que ce dernier délai ne puisse excéder un an après la cessation du contrat. Le travailleur ayant quitté l’entreprise depuis plus d’un an ne peut donc plus réclamer les droits nés de son ancien contrat de travail. En effet, l’action qu’il pourrait intenter pour faire valoir ces droits est prescrite. L’employeur doit également tenir compte de ce principe lorsqu’il souhaite réclamer quelque chose à son travailleur.

Notez que ce principe n’est toutefois pas applicable aux obligations de l’employeur qui font l’objet d’une sanction pénale (par exemple : le paiement d’arriérés de rémunération suite au non-respect d’un barème d’une CCT rendue obligatoire par arrêté royal, le paiement de la rémunération restant due, le paiement du pécule de vacances). Pour ces actions, un délai de prescription de 5 ans après le fait qui a donné naissance à l’action s’applique.

Jusqu’à présent, la seule manière d’interrompre ce délai de prescription consiste en l’assignation à comparaître devant le tribunal de travail.

A partir du 11 juillet 2013, les délais de prescription de 1 et 5 ans dont question ci-dessus peuvent être prolongés de sorte que le délai pendant lequel le travailleur peut intenter une action contre son (ancien) employeur devient plus long.

L’article 2244 du Code civil stipule notamment que l’avocat ou l’organisation syndicale du travailleur (ou le huissier de justice désigné par le travailleur) peut interrompre le délai de prescription de 1 ou 5 ans, pour un an au plus, par une mise en demeure notifiée par lettre recommandée à l’employeur. La mise en demeure fait donc démarrer un nouveau délai de 1 an, sans toutefois que l’action puisse se prescrire avant la fin du délai de prescription initial.

L’effet interruptif de cette mise en demeure n’a lieu qu’une seule fois. L’interruption du délai de prescription se produira au moment de l’envoi de la mise en demeure par lettre recommandée contre accusé de réception

Par exemple : l’employeur licencie le travailleur pour motif grave le 29 juillet 2013. Le délai de prescription de 1 an prend fin le 29 juillet 2014 et l’action du travailleur pour contester son licenciement est prescrite le 30 juillet 2014. La notification d’une mise en demeure le 20 juillet 2014 prolonge le délai de prescription initial de 1 an jusqu’au 20 juillet 2015 inclus. L’action sera donc prescrite le 21 juillet 2015, sauf assignation devant le tribunal.

Pour que la mise en demeure puisse interrompre la prescription, elle doit comporter de manière explicite les informations suivantes :

1. Les coordonnées du créancier :

  • Pour une personne physique : le nom, le prénom et l’adresse du domicile ou le cas échéant de la résidence ou du domicile élu ;
  • Pour une personne morale : la forme juridique, la dénomination et l’adresse du siège social ou le cas échéant du siège administratif.

2. Les coordonnées du débiteur :

  • Pour une personne physique : le nom, le prénom et l’adresse du domicile ou le cas échéant de la résidence ou du domicile élu ;
  • Pour une personne morale : la forme juridique, la dénomination et l’adresse du siège social ou le cas échéant du siège administratif.

3. La description de l’obligation qui a fait naître la créance ;

4. Si la créance porte sur une somme d’argent, la justification de tous les montants réclamés au débiteur en ce compris l’indemnisation et les intérêts de retard ;

5. Le délai dans lequel le débiteur peut s’acquitter de ses engagements avant que des mesures de recouvrement complémentaires ne soient prises ;

6. La possibilité de procéder en justice en vue de l’élaboration d’autres mesures de recouvrement si le débiteur ne répond pas dans le délai fixé ;

7. L’effet interruptif de la prescription suite à cette mise en demeure ;

8. La signature de l’avocat du travailleur, de l’huissier de justice désigné à cet effet par le travailleur ou du délégué de l’organisation syndicale du travailleur.

Cette nouvelle possibilité permet à chaque partie de ne pas devoir citer immédiatement et de supporter les frais liés à cette citation. A l’approche de la fin du délai de prescription initial, lorsque l’une des parties n’a pas encore répondu favorablement à la demande de l'autre partie, cette dernière peut, par cette mise en demeure, prolonger le délai de prescription d’un an.