Coupe du Monde de football au travail : droits et obligations de l’employeur

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A la veille du début de la Coupe du Monde de football au Brésil, faisons un bref état des lieux des droits et obligations de l’employeur et de son personnel pendant celle-ci.

1. Un employeur, soucieux de renforcer les liens sociaux entre ses travailleurs, peut-il mettre en place des écrans afin de permettre à son personnel, après les heures de travail, de regarder les matchs dans une ambiance festive ?

La réponse à cette question est évidemment affirmative, à condition que certains règles élémentaires, précisées ci-après (points 1.1 à 1.3), soient respectées.

L’employeur veillera en tout état de cause à communiquer auprès de ses travailleurs que la participation à la fête se fait sur une base volontaire (càd sans y avoir été contraint moralement par son employeur) et en dehors des heures de travail, de manière à exclure tout état de subordination des travailleurs à l’égard de leur employeur pendant ledit événement. De cette manière, il limitera également l’étendue éventuelle de sa responsabilité en cas d’accident dont serait victime un travailleur sur le chemin du retour vers son domicile.

1.1 La mise à disposition, dans ce cadre, de boissons alcoolisées est-elle autorisée ?

Tout va dépendre de la politique préventive en matière de consommation d’alcool et de drogues prévue par l’entreprise dans son règlement de travail. Dans le cadre de cette politique, soit l’employeur fait le choix d’une tolérance zéro tant en termes de disponibilité que de consommation d’alcool sur le lieu de travail, soit, au contraire, il tolère celles-ci dans une mesure raisonnable à l’occasion, par exemple, d’événements festifs liés à l’entreprise. Dans ce dernier cas, la consommation raisonnable de boissons alcoolisées sera permise.

1.2 L’employeur doit-il organiser un moyen de transport afin d’assurer le retour en toute sécurité de ses travailleurs à leur domicile ?

L’employeur ne doit pas perdre de vue qu’il a l’obligation légale de veiller à la sécurité de ses travailleurs. Ainsi, afin de garantir cette sécurité et de limiter sa responsabilité éventuelle en cas d’accident survenant au sortir d’une fête trop arrosée ayant eu lieu dans les locaux de l’entreprise, il est recommandé d’organiser le retour des travailleurs à leur domicile par un moyen de transport sûr (taxi, bus etc.) ou, à tout le moins, d’encourager ceux-ci à utiliser les transports en commun.

1.3 Quid si, sur le chemin du retour vers son domicile, un travailleur est victime d’un accident ? S’agit-il d’un accident (survenu sur le chemin) du travail ?

L’accident qui survient sur le trajet normal que le travailleur doit parcourir pour se rendre de sa résidence au lieu de l'exécution du travail, et inversement, est en principe couvert par l’assurance sur les accidents de travail (si toutes les conditions requises sont réunies).

Dans ce cadre, est en principe assimilée au « lieu de travail » la salle où est organisée une fête de l'entreprise à laquelle le travailleur ne peut moralement pas se soustraire. En l’espèce, dès l’instant où, comme précisé ci-dessus, il s’avère que l’événement a lieu en dehors des heures de travail et que le travailleur y participe de manière volontaire, il ne saurait être question de départ depuis le lieu de travail au sens où la loi entend cette notion de sorte que les conditions nécessaires à l’existence d’un accident (survenu sur le chemin) du travail ne seraient pas réunies.

De même, si le travailleur n’assiste pas au match dans les locaux de l’entreprise mais le suit dans un café où il consomme de l’alcool et qu’ensuite, il est victime d’un accident en retournant à son domicile, il est peu probable que l’assureur accident du travail admette qu’il s’agissait du « trajet normal » vers le domicile vu le détour prolongé par le café.

2. Les travailleurs peuvent-ils, pendant leurs heures de travail, regarder un match ou suivre l’évolution du résultat de celui-ci via internet ?

Il est tout d’abord utile de rappeler que l’exécution de bonne foi du contrat de travail et l’obligation essentielle pesant sur le travailleur de fournir des prestations de travail empêche qu’il suive un match complet de football pendant ses heures de travail à moins que l’employeur ne marque son accord.

Une fois cette considération générale rappelée, se pose la question de l’autorisation de l’utilisation, à des fins privées, de l’infrastructure informatique de l’employeur et du contrôle que ce dernier peut exercer à l’égard de ses travailleurs.

S’agissant de la première question, l’autorisation ou l’interdiction de l’usage privé d’internet (qui est avant tout un outil de travail mis à disposition des travailleurs) devra être réglée au niveau de l’entreprise, par la voie d’une convention collective de travail ou du règlement de travail. Ces règles détermineront, par exemple, que tout usage privé est strictement interdit ou que celui-ci n’est autorisé que pendant les temps de pause.

En ce qui concerne ensuite le contrôle pouvant être exercé par l’employeur sur cet usage privé éventuellement autorisé, il existe une réglementation très stricte en la matière, à savoir la convention collective de travail interprofessionnelle n°81. Cette CCT détermine les conditions d'un tel contrôle et selon quelles procédures il peut avoir lieu, tout en veillant au respect du droit à la vie privée des travailleurs sur leur lieu de travail.

3. Un travailleur peut-il imposer la modification de son horaire de travail afin de ne pas louper les matchs ?

Non, bien entendu. Toute modification d’un horaire de travail ne peut s’envisager que de manière concertée avec l’employeur par le biais d’un avenant au contrat de travail qui déterminera par exemple, un horaire de travail alternatif pendant toute la durée de la Coupe du Monde (ou uniquement les jours des matchs des Diables rouges).

4. Les travailleurs peuvent-ils venir travailler affublés de la vareuse ou de tout autre accessoire de leur équipe favorite ?

La loi ne règle pas la question de la tenue vestimentaire des travailleurs salariés. Certains balises devront néanmoins être respectées :

  • tout d’abord, l’analyse des risques menées par votre conseiller en prévention pourrait conclure à la nécessité, pour certains travailleurs, de porter certains vêtements de travail et/ou de protection absolument indispensable à leur sécurité et/ou santé ; le travailleur qui ne respecterait pas les obligations découlant de ces prescriptions commettrait assurément un manquement contractuel ;
  • ensuite, votre règlement de travail pourrait déterminer un code vestimentaire applicable à une certaine catégorie de travailleurs compte tenu, par exemple, de leurs contacts fréquent avec la clientèle ou des prospects ;
  • enfin, la loi sur les contrats de travail précise que le travailleur doit respecter les convenances et les bonnes mœurs pendant l’exécution de son contrat de travail, ce qui empêchera le travailleur de porter des tenues trop extravagantes.