Priorité pour les travailleurs à temps partiel en cas d’emploi vacant : Plus de détails sur la cotisation de responsabilisation

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Il y a quelques mois, nous vous informions de l’introduction d’une nouvelle cotisation de responsabilisation à charge des employeurs qui n’octroieraient pas en priorité un emploi vacant dans l’entreprise à leurs travailleurs à temps partiel involontaires. Un arrêté royal du 2 mai 2019 vient à présent concrétiser et détailler les contours de cette nouvelle mesure.

Priorité pour l’octroi d’un emploi vacant

Le travailleur à temps partiel peut réclamer par écrit à son employeur le droit d’obtenir, en priorité, un emploi à temps plein ou un autre emploi à temps partiel (éventuellement complémentaire) sur la base duquel il se verrait accorder un nouveau régime de travail à temps partiel dont la durée hebdomadaire serait supérieure à celle du régime à temps partiel dont il relève.

Sanction : Une cotisation de responsabilisation

La loi-programme du 25 décembre 2017 a introduit une sanction financière pour les employeurs qui n’accorderaient pas, en priorité, un emploi vacant aux travailleurs à temps partiel qui en ont fait la demande et qui bénéficient d’une allocation de garantie de revenus.

Il s’agit d’une cotisation de responsabilisation s’élevant à 25 € par mois. Un arrêté-royal déterminant les modalités d’exécution de la mesure devait cependant encore être adopté, c’est désormais chose faite !

Dans cet article, nous vous exposons via une série de questions/réponses les détails de cette nouvelle mesure.

1. La mesure s’applique-t-elle à tous les travailleurs à temps partiel ?

Non.

Tous les travailleurs à temps partiel peuvent prétendre en priorité à l’obtention d’un emploi vacant disponible dans l’entreprise. Par contre, seul l’employeur qui n’accorderait en priorité un emploi vacant  à un de ses travailleurs à temps partiel bénéficiant d’une allocation de garantie de revenus pourrait se voir sanctionner par le paiement de la cotisation de responsabilisation.

Afin de conserver leur allocation, ces travailleurs sont par ailleurs tenus d’introduire auprès de leur employeur une demande d’obtention d’un emploi vacant leur permettant de bénéficier d’un régime de travail supérieur.

Le nouvel arrêté royal précise cependant que certaines catégories de travailleurs sont exclues du régime de priorité. Leur employeur échappe donc au risque de la cotisation de responsabilisation qui en découle. Il s’agit :

  • Des travailleurs qui n’entrent pas dans le champ d’application de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires ;
  • Des travailleurs intérimaires occupés par une entreprise de travail intérimaire avec un contrat de travail intérimaire ;
  • Des travailleurs occupés par un employeur agréé avec un contrat de travail titres-services ;
  • Des travailleurs occupés en tant que travailleurs occasionnels.

2. Tous les emplois vacants doivent-il être proposés prioritairement aux travailleurs à temps partiel de l’entreprise ?

Non.

Tout d’abord, cette obligation ne doit être respectée qui si le travailleur à temps partiel a effectivement introduit une demande écrite auprès de son employeur visant à se voir proposer les emplois à temps plein vacants ou les emplois à temps partiel vacants qui, prestés seuls ou à titre complémentaire, lui procureraient un régime de travail avec une durée hebdomadaire supérieure.

Dans une telle situation, l’employeur a pour obligation de confirmer par écrit au travailleur la réception de cette demande et de lui confirmer qu’il donnera suite à se demande. Si vous souhaitez obtenir un modèle, vous pouvez en tant que client Group S prendre contact avec votre gestionnaire de dossiers.

Ensuite, il faut que l’emploi disponible dans l’entreprise concerne une fonction similaire à celle exercée par le travailleur à temps partiel et pour laquelle il a les qualifications requises.

Enfin, l’employeur ne doit proposer l’emploi vacant au travailleur à temps partiel que si cela peut lui permettre d’augmenter son régime de travail durant une période ininterrompue de minimum un mois ou une période indéterminée. Il importe peu que cette augmentation du régime de travail résulte d’une adaptation du contrat de travail existant ou de la conclusion d’un nouveau contrat.

3. Quelles sont les formalités à respecter par l’employeur lors de la communication de l’emploi vacant ?

Cette communication doit être faite dans un délai d’un mois à partir du jour suivant le jour où l’emploi devient vacant.

Cette communication peut se faire de la main à main ou de manière électronique moyennant un accusé de réception du travailleur. A défaut, elle doit se faire via l’envoi d’un courrier recommandé.

La communication doit au minimum contenir les informations suivantes concernant l’emploi vacant :

  • Une description sommaire du poste ;
  • La durée du contrat proposé ;
  • Le régime et l’horaire de travail prévu ;
  • Le lieu de travail prévu.

L’employeur doit, par ailleurs, indiquer le délai endéans lequel le travailleur à temps partiel est tenu de réagir, ce délai ne pouvant être inférieur à une semaine et supérieur à un mois.

Si vous souhaitez obtenir un modèle afin d’effectuer cette communication, vous pouvez en tant que client Group S prendre contact avec votre gestionnaire de dossiers.

Il est à noter que l’employeur est tenu de conserver une copie de cette communication (et son éventuel accusé de réception), sous format papier ou électronique, durant 7 ans.

En cas de refus de l’emploi vacant par le travailleur, l’employeur est tenu d’en informer le bureau régional de l’ONEm (voir question 8).

4. Quelle est la sanction pour les employeurs qui ne respecteraient pas ces obligations ?

Les employeurs qui ne respecteraient pas les obligations précitées (communication au travailleur de l’emploi vacant, conservation de l’éventuel accusé de réception, non-respect de la priorité pour le travailleur) seront tenus de payer une cotisation de responsabilisation de 25 € par mois et par travailleur à temps partiel remplissant les conditions précitées. La cotisation sera due pour un trimestre entier.

5. A partir de quand cette sanction s’applique-t-elle ?

La cotisation de responsabilisation est due à partir du trimestre qui suit les 4 trimestres au cours desquels au moins une heure était disponible et au cours desquels aucun travailleur à temps partiel remplissant les conditions ne s’est vu octroyer prioritairement la ou les heures disponibles de manière à augmenter son temps de travail.

Le respect de ces obligations est contrôlé à partir du 1er avril 2019. La cotisation de responsabilisation ne sera donc quant à elle due qu’à partir du 1er avril 2020 au plus tôt. En effet, l’évaluation du volume de travail par l’ONSS se faisant plusieurs mois après les déclarations trimestrielles de l’employeur, il se peut que l’application des premières sanctions n’aient lieu que quelques mois plus tard.

6. A partir de quand la cotisation n’est-elle plus due ?

La cotisation est due pour un trimestre entier. Toutefois, la cotisation de responsabilisation n’est plus due :

  • A partir du trimestre au cours duquel toutes les heures disponibles ont été attribuées à au moins un travailleur remplissant les conditions précitées, de sorte que son régime de travail a augmenté.
  • A partir du trimestre pendant lequel l’employeur a été redevable de la cotisation de responsabilisation pendant quatre trimestres consécutifs et qu’aucune nouvelle heure n’a été disponible durant ces quatre trimestres.

Exemple : Un travailleur à mi-temps avec allocation de garantie de revenus introduit une demande pour bénéficier prioritairement d’un emploi vacant, le 1er avril 2020. Le 10 juillet 2020, l’employeur attribue 15 heures disponibles dans l’entreprise à un nouvel engagé alors que ces heures auraient pu être attribuées au travailleur à temps partiel. A partir du troisième trimestre 2020, l’employeur est donc redevable d’une cotisation de 25€/mois. A partir du troisième trimestre 2021, l’employeur ne sera plus redevable de cette cotisation si durant les 4 trimestres précédents (durant lesquels l’employeur a payé la cotisation) aucune nouvelle heure n’a été disponible.

7. L’employeur peut-il échapper au paiement de cette cotisation ?

Oui.

Tout d’abord, la cotisation de responsabilisation n’est applicable qu’aux contrats de travail conclus à partir du 1er janvier 2018.

Ensuite, la cotisation de responsabilisation n’est pas due si aucune heure n’a été disponible dans l’entreprise durant un an à dater de la première demande d’obtention d’un emploi vacant par le travailleur à temps partiel.

Enfin, l’employeur pourra échapper au paiement de la cotisation de responsabilisation dans les cas suivants :

  • S’il peut démontrer que le travailleur à temps partiel ne remplissait pas les conditions précitées ;
  • S’il peut démonter qu’il a effectivement octroyé toutes les heures disponibles à un travailleur à temps partiel remplissant les conditions précitées ;
  • S’il peut démontrer que les heures disponibles ne concernaient pas la même fonction que celle du travailleur à temps partiel ou que celui-ci ne disposait pas des qualifications nécessaires ;
  • S’il peut démonter qu’il a proposé les heures disponibles au travailleur à temps partiel remplissant les conditions mais que celui-ci a refusé la proposition ;
  • S’il peut démontrer que le travailleur à temps partiel n’entrait pas en ligne de compte pour l’attribution des heures disponibles parce qu’il s’agissait d’heures se rapportant à des prestations pendant les mêmes tranches horaires que celles durant lesquelles ce travailleur est déjà occupé ;
  • S’il peut démontrer que le travailleur à temps partiel est occupé dans une autre unité d’établissement que celle dans laquelle des heures sont disponibles.

Dans ces deux dernières hypothèses, il semble que l’employeur soit tout de même tenu de communiquer l’emploi vacant au travailleur.

8. Quelles sont les démarches concrètes à réaliser par l’employeur pour échapper à cette éventuelle sanction ?

Afin de ne pas se voir appliquer le paiement de la cotisation de responsabilisation à titre de sanction, l’employeur veilla à respecter les étapes suivantes :

  1. L’employeur doit identifier parmi ses travailleurs à temps partiel ceux qui bénéficient d’une allocation de garantie de revenus ;
  2. L’employeur doit identifier parmi ces travailleurs ceux dont le contrat qui a été été conclu à partir du 1er janvier 2018 ;
  3. L’employeur doit ensuite vérifier si ces travailleurs ont bien introduit une demande écrite visant à bénéficier prioritairement d’un emploi vacant dans l’entreprise.

Dans une optique de contrôle, cette analyse doit être répercutée à l’ONSS. En effet, au début de l’occupation, l’employeur doit désormais mentionner dans la DRS-scénario 3 si le travailleur a introduit ou non une demande d’obtention prioritaire d’un emploi vacant.

Le formulaire de la DRS-scénario 3 sera prochainement adapté en ce sens.

  1. En cas de nouvel emploi disponible dans l’entreprise, l’employeur doit vérifier si cet emploi est compatible avec un des travailleurs identifiés aux étapes précédentes ;
  2. Le cas échéant, l’employeur doit proposer et attribuer cet emploi à un des travailleurs identifiés aux étapes précédentes.
    Toujours dans une optique de contrôle, l’employeur doit désormais indiquer dans la DRS-scénario 6 (mensuelle) si le travailleur a refusé au cours du mois un emploi vacant qui lui a été proposé.

Toujours dans une optique de contrôle, l'employeur doit désormais indiquer dans la DRS-scénarion 6 (mensuelle) si le travailleur a refusé au cours du mois un emploi vacant qui lui a été proposé.

Le formulaire de la DRS-scénario 6 sera prochainement adapté en ce sens.

  1. Si cet emploi vacant n’est pas effectivement proposé aux travailleurs identifiés aux étapes précédentes, l’employeur doit veiller à pouvoir fournir une justification acceptable (voir question 7).
     

L’ONSS, l’ONEm et l’Inspection des lois sociales devraient prochainement organiser un nouveau système d’échange d’informations de manière à détecter les employeurs qui ne respecteraientt cette obligation d’octroi prioritaire d’un emploi vacant.

 

Sources :

Loi-programme du 22 décembre 1989, articles 152 à 156/1, M.B. 30 décembre 1989 ;

Loi-programme du 25 décembre 2017, article 68, M.B. 29 décembre 2017 ;

Arrêté royal du 2 mai 2019 portant exécution des dispositions de la loi programme du 22 décembre 1989 relatives à la priorité aux travailleurs à temps partiel pour l’obtention d’un emploi vacant chez leur employeur, M.B. 15 mai 2019.