En route vers un nouveau régime de vacances (européennes)

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Récemment, la Belgique a été mise en demeure par la Commission européenne pour ne pas avoir appliqué correctement les règles applicables aux congés payés annuels. La législation belge sur les vacances annuelles dans le secteur privé fait une distinction entre l’exercice de vacances et l’année de vacances, l'exercice de vacances étant l’année dans laquelle les prestations ont été effectuées et l'année de vacances étant l’année subséquente dans laquelle les vacances peuvent être prises. Dans la pratique, le travailleur n’a pas droit à des congés payés dans sa première année de travail.

Selon la Commission européenne, la Belgique manque à son obligation de transposer en sa législation nationale la Directive 2003/88/EC relative à certains aspects de l’organisation du temps de travail. En application de cette Directive, le travailleur a droit à des vacances dès sa première année de travail. La Belgique devra honorer ses engagements internationaux en ce domaine pour le 24 avril 2012.

Le 30 mars 2012, le Moniteur Belge a publié la loi portant des dispositions diverses du 29 mars 2012. Par ce biais, le législateur belge cherche à mettre en concordance la réglementation belge avec la réglementation européenne. Cette loi prévoit en application de l’avis du Conseil, un complément à la réglementation belge, les vacances ‘européennes’, afin de permettre aux travailleurs du secteur privé de pouvoir utiliser plus rapidement les droits aux congés acquis. Etant donné que la loi ne prévoit pas une date d’entrée en vigueur, cette réglementation est censée entrer en vigueur le dixième jour suivant sa publication au Moniteur Belge, en l’occurrence le 9 avril 2012. Le contenu de la loi est vague et les arrêtés d’exécution qui doivent en fixer les modalités d’application doivent encore être pris.

Comment se présente ce régime des vacances européennes?

En plus du droit normal aux congés, il sera octroyé un droit à des vacances supplémentaires d’une durée d’une semaine par période de trois mois prestés. Ce supplément de vacances ‘européennes’ permettra aux travailleurs de prendre effectivement des vacances dans le courant de l’année civile dans laquelle ils ont effectué des prestations en proportion avec celles-ci, lorsque la durée de leurs vacances, calculée en fonction de leurs prestations effectuées pendant l’exercice précédent, est plus courte que la durée des vacances calculées en fonction des prestations effectuées pendant l’année en cours.

Le droit aux vacances européennes et au pécule européen ne peut être exercé qu’à partir du moment où les périodes d’occupation d’une année civile correspondent au moins à trois mois. Ainsi, il est également possible de garantir dans le courant de l’année des prestations, le droit normal à une période de vacances ininterrompue d’au moins une semaine. Pour le calcul de ces trois mois, il est tenu compte, quel que soit la nature du contrat de travail, de la totalité des périodes d’occupation dans l’année civile concernée. Dès que le travailleur réalise dans l’année civile, trois mois de prestations au total, il peut à la fin de cette période de trois mois exercer son droit à une semaine de vacances européennes.

En outre, il est possible pour le travailleur d'exercer son droit aux vacances européennes après avoir épuisé ses jours de congés normaux octroyés en fonction des prestations qu'il a effectué pendant l’exercice de vacances précédent, avec maintien de sa rémunération normale (simple pécule). Toutefois, ce simple pécule sera considéré comme le paiement anticipé du pécule constitué normalement. Les jours de vacances octroyés par la nouvelle réglementation  sont assimilés à des prestations de travail, tout comme les jours de congés légaux. Comme nous le verrons ci-après, les modalités de calcul de ce pécule soulèveront quelques questions.

Enfin, la nouvelle réglementation ne porte pas atteinte aux réglementations existantes des vacances jeunes et séniors. Les travailleurs concernés pourront choisir pour une même année entre ces réglementations et les ‘vacances européennes’.

Cependant, la nouvelle réglementation soulève quelques questions:

  • Le travailleur occupé à temps plein qui reprend le travail à temps plein après avoir bénéficié d’un an de crédit-temps à temps partiel, aura-t-il droit à des vacances européennes étant donné qu’il n’aura pas droit à quatre semaines de vacances?
  • Certaines périodes d’inactivité ou de suspension ne sont pas assimilées ou ne le sont que pour une durée limitée dans le cadre de la législation belge (par exemple, les périodes de maladie bénéficient d’une assimilation maximum d’un an). Des vacances européennes sont-elles à octroyer dans ce cas?
  • Même pendant l’année civile de prise  / reprise d’activité, la ‘réglementation belge sur les vacances européennes’  ne prévoit pas toujours quatre semaines de vacances étant donné que les périodes de trois mois d’activité non complètes sont ”tronquées”. Cependant, tout travailleur a droit aux vacances annuelles.
  • Que se passe-t-il en cas de changement d’employeur? Le travailleur qui n’a pas épuisé ses vacances supplémentaires, pourra-t-il prendre le solde chez le nouvel employeur?
  • Un dernier problème se pose concernant la déduction du pécule octroyé au début ou à la reprise de l’activité. Cette déduction se fait sur la partie du pécule légal qui ne correspond pas au salaire normal des jours de vacances. Le Roi fixe le moment de la déduction, ainsi que son montant et la durée. Un arrêté d’exécution devra également être pris bien qu’il ne soit pas inconcevable que ce pécule donne lieu, après déduction, à un solde négatif.

Nous n'avons plus qu'espérer que les acteurs intéressés (les employeurs et leurs secrétariats sociaux, les caisses de vacances) soient prêts à accueillir le nouveau système et que la procédure d’infraction à l’encontre de la Belgique soit arrêtée.

Nous vous tiendrons informés...