Que faire en cas de coupures de courant (pas) annoncées pour l'hiver prochain ?


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Suite à la mise à l'arrêt d’un certain nombre de centrales nucléaires, nous risquons une pénurie d’électricité cet hiver. Pour pallier cette pénurie, le gouvernement a prévu des plans de délestage afin d’éviter que l’ensemble du pays ne subisse une coupure de courant généralisée. Il est en particulier possible que l’on procède dans certaines communes à des coupures de courant temporaires et annoncées, de trois heures maximum, entre 17 h et 20 h.

De tels délestages d’électricité ont naturellement aussi des conséquences pour les entreprises. Quelles sont les obligations des employeurs par rapport à leurs travailleurs et quel texte de loi peuvent-ils invoquer ?

L’employeur peut-il suspendre le contrat de travail de ses travailleurs pour raisons de force majeure ?

La réponse à cette question dépend du caractère soudain ou prévisible de la coupure de courant.

    Coupure de courant inattendue

S’il s’agit d’une coupure de courant soudaine, inattendue, qui n’a pas été annoncée à l’avance, l’employeur peut invoquer la force majeure.

Si une telle coupure de courant a lieu durant le temps de travail et que le travailleur ne peut par conséquent pas poursuivre l’exécution du travail auquel il était occupé pour une cause indépendante de sa volonté, le travailleur conserve le droit à sa rémunération normale à charge de l’employeur (art. 27 de la loi du 03/07/1978 relative aux contrats de travail).

Si la coupure de courant inattendue se poursuit pendant un certain nombre de jours de travail, l’employeur peut introduire auprès de l’ONEM une demande de chômage temporaire pour cause de force majeure. Pour que l’ONEM reconnaisse la situation de force majeure, il doit s’agir d’un événement indépendant de la volonté de l'employeur et du travailleur qui rend l’exécution du contrat de travail temporairement et totalement impossible. Les travailleurs peuvent alors bénéficier d’allocations de chômage temporaire pour cause de force majeure.

    Coupure de courant annoncée

L’employeur ne pourra pas invoquer la réglementation relative au chômage temporaire pour cause de force majeure. En effet, il ne s’agit pas dans ce cas d’un événement soudain, imprévisible.

Comme l’employeur reste tenu de fournir du travail aux travailleurs, il doit prévoir des alternatives comme le télétravail (avec l’accord des travailleurs concernés), l’attribution d’autres tâches correspondant aux qualifications du travailleur, l’utilisation de générateurs, le recours à un autre lieu de travail (avec accord des travailleurs concernés sauf si le lieu de travail est un élément accessoire de la relation de travail), une formation, des activités de teambuilding, un changement d’horaire (avec accord des travailleurs concernés), un congé ou des jours de repos compensatoire (avec l’accord des travailleurs concernés), etc.

Si des heures sont malgré tout perdues parce que les travailleurs ne peuvent pas commencer le travail ou le poursuivre, l’employeur devra leur payer leur rémunération normale vu que l’absence de travail est indépendante de leur volonté (art. 27 de la loi du 03/07/1978 relative aux contrats de travail).

Qu’en est-il des travailleurs qui arrivent en retard au travail en raison d’une coupure de courant ?

Le travailleur conserve uniquement le droit à sa rémunération normale si la cause de son retard ou de son absence découle d’un motif survenu sur le chemin du travail et indépendant de sa volonté. Le travailleur devra prouver qu’il se trouvait dans l’impossibilité totale de se rendre au travail. Le travailleur doit en effet agir en bon père de famille et faire le nécessaire pour arriver à temps au travail.

La réponse à cette question dépend également de la prévisibilité de la coupure de courant.

Dans le cas où le travailleur se rend au travail (par ex. en train) mais n’y arrive pas (à temps) en raison d’une coupure de courant inattendue, l’employeur est tenu de lui payer le salaire journalier garanti (art. 27 de la loi du 03/07/1978 relative aux contrats de travail) pour autant que les conditions suivantes soient remplies :

  • le travailleur doit se rendre « normalement » au travail, autrement dit dans des circonstances normales en termes d’horaire, de lieu et de moyens ;
  • la coupure de courant doit survenir alors que le travailleur se rend au travail et par exemple pas alors qu’il est chez lui ;
  • le retard ou l’absence doit être indépendant(e) de la volonté du travailleur, ce qui est le cas lors d’une coupure de courant inattendue.

L’employeur est toujours libre de demander au travailleur de fournir la preuve que celui-ci se trouvait dans l’impossibilité totale de se rendre au travail afin de conserver le droit à sa rémunération normale.

Si la coupure de courant a été annoncée en avance, le travailleur n’aura en principe pas droit à sa rémunération normale pour les heures non prestées. Il est conseillé que l’employeur en informe au préalable ses travailleurs afin qu’ils puissent éventuellement convenir ensemble d’autres dispositions comme la prise de jours de congé ou de repos compensatoire.